Je passe quelques semaines à Londres au cours desquelles je travaille au King’s College, à coté de Waterloo station. La Tate modern est à deux pas et est ouverte en nocturne le vendredi. J’y retrouve donc mon ami Lewis Heritz pour une visite de l’expo Miró (ouverte du 14 avril au 11 septembre 2011), histoire de bien commencer ce week-end pluvieux.
L’exposition est une rétrospective de l’œuvre de l’artiste catalan, figure majeure du courant surréaliste. A travers pas moins de 150 œuvres – peintures, dessins, sculpture, etc.- on découvre sa vie du début du XXème aux années 70, entre Barcelone, Paris et New-York, et en filigrane, l’histoire politique mouvementée de cette époque, marquée entre autres par deux guerres mondiales, la guerre d’Espagne, la dictature de Franco et la révolte de mai 68.
Impossible de relater dans le détail toute cette exposition dont la visite peut facilement prendre deux heures. Dans la première salle, on est surpris par des œuvres précoces, inspirées de son enfance à la ferme de Mont-roig, propriété de ses parents. Elles sont complètement différentes de l’idée que l’on a habituellement des œuvres de Miró. Dans la suite de l’exposition, on découvre l’influence qu’à pu avoir cette période tout au long de sa vie. Autre référence majeure à sa Catalogne natale : la figure du paysan catalan parfois uniquement figuré par son chapeau rouge. Dans les années 20, en partie passées à Paris au contact des surréalistes parmi lesquels André Breton, Miró peint une série centrée sur la figure du paysan catalan pour lui symbole de la lutte catalane contre la domination castillane.
Au milieu de l’expo, on (du moins mon ami Lewis qui semble y trouver une incroyable source d’inspiration pour son propre travail) tombe en arrêt devant une impressionnante série de 50 lithographies, dite série de Barcelone. Ogres et dictateurs inspirés d’Ubu Roi, la pièce d’Alfred Jarry, y paradent. Cette série se veut être une dénonciation de la dictature franquiste qui règne en Espagne de 1939 à 1975. Ces lithographies ont été imprimées durant l’été 1944 en seulement 7 exemplaires chacune à cause des difficultés d’approvisionnement en papier dans l’Espagne de cette époque, marquée par de multiples restrictions.
Sans plus détailler les contenus des treize salles qui forment l’exposition, quel bilan peut-on en tirer ? Certains pourront reprocher à la Tate de programmer une exposition blockbuster, sans grande originalité. Soit mais elle fait bien son office. On passe un bon moment, à la (re)découverte d’un artiste qui a indéniablement marqué le siècle qu’il a traversé (1893-1983). Mais, car il y a un mais, je déplorerais le manque de dispositif de médiation qui pourrait faciliter l’accès aux œuvres. Comme d’habitude dans les musées d’art moderne, on nous sert un white cube, des textes d’introduction à chaque salle (dont je note tout même l’accessibilité) et des cartels tout petits. D’accord c’est un style muséographique que certains apprécient mais que diable, laisser parler l’œuvre par elle-même n’interdit pas de proposer une mise en contexte plus évidente. Et ne me parlez pas des guides multimédias proposés sur smartphone. Si je visite une expo, ce n’est pas pour faire des allers-et-retours continuels entre l’accrochage et un écran de 10 cm sur 5. Mon cristallin est paresseux (1), je voudrais tout avoir sur le même plan. Dernier point, je remarque que tous les textes sont proposés en anglais uniquement : pas très tourists and minority friendly.
(1) Le cristallin est ce qui permet à l’œil de faire la mise au point lorsque la distance entre l’objet regarder et l’œil varie.
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