Du 19 février au 9 mai 2010, le musée d’Art moderne de la ville de Paris présente une rétrospective de Charley Toorop (1891-1955), artiste phare de l’art moderne néerlandais. L’exposition retrace l’évolution de l’oeuvre au cours de la vie de l’artiste, et réussit à nous faire ressentir sa présence.
Charley Toorop, fille de peintre et mère de peintre, mais au style bien distinct de celui de son père, Jan, et qui ne sera pas celui de son fils, Edgar Fernhout. Amie de Mondrian et de Bart van der Leck, mais loin d’être une peintre de l’abstraction et de la pure visualité. Peintre d’un réalisme engagé, elle se présente comme une artiste de la nouvelle objectivité, mouvement dont elle suit plutôt les exemples issus du cubisme, comme Fernand Léger. Toorop ne trouve pas tout de suite son propre langage, suit des influences, s’égare dans des natures mortes et des paysages… et petit à petit s’affirme sa peinture des portraits, dont de nombreux autoportraits. Ils sont ses chefs d’oeuvres et son moyen d’expression le plus signifiant : une extrême sensibilité aux volumes, à la force des traits, à l’expression de bien plus qu’une simple surface mais d’une identité profonde, mentale, sociale. Les regards sont accentués par l’hypertrophie des yeux jusqu’à devenir englobants, hypnotiques.
L’exposition montre l’évolution de l’oeuvre de Charley Toorop tout au long de sa vie, l’importance de plus en plus grande accordée aux portraits, mais aussi deux salles consacrées à la famille, aux amis, amants, influences. En approchant de la dernière salle, après avoir vu deux autoportraits dans sa jeunesse, sa photo par Man Ray, on a pu mettre un visage sur ses oeuvres. La dernière salle rend la présence de Toorop tellement forte que l’on pourrait la croire hantée, avec des photos, dont celles d’Eva Besnyö, impression qui culmine avec l’imposant tableau Trois générations où l’on se retrouve face au regard perçant de Toorop, et encore comme regardé de côté par une série de ses derniers autoportraits. J’ai ressenti une vraie émotion à cet endroit précis, qui justifie à elle seule les raisonnables 7€ de l’entrée. A noter aussi, dans la même salle, des peintures très fortes de la désolation de la guerre, dont l’inquiétant Clown.
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