Instant philosophique : l’aporie de Diodore

Certains d’entre vous vont me regarder bizarrement. Ce soir, nous allons parler un peu philosophie, avec une aporie qui me stimule toujours, et que j’aime bien proposer autour de moi.

Petit rappel pour ceux dont la Terminale commence à se faire loin : une aporie, c’est un cul-de-sac dans le raisonnement, un problème insoluble et néanmoins incontournable. Amusons-nous un peu : à la question aporétique « La lumière est-elle une onde ou une particule ? », la réponse la plus sensée est « Oui ». Ou « les deux, mon capitaine », mais c’est moins drôle.

Bref. Cette aporie dont je veux parler, c’est l’aporie de Diodore, nom de famille Cronos. On appelle aussi cette aporie l’argument dominateur, puisque c’est un peu l’argument fatal pour un système philosophique vis-à-vis d’un autre. Comment s’exprime donc cette aporie ? Sous la forme de trois propositions, tout ce qu’il y a de plus honnêtes, mais qui ne peuvent pas toutes être vraies en même temps, ce qui la fout mal, vous en conviendrez.

Épictète nous les rapporte ainsi :

1. « Toute proposition vraie concernant le passé est nécessaire. »
2. « L’impossible ne suit pas logiquement du possible. »
3. « Est possible ce qui n’est pas actuellement vrai et ne le sera pas. »

Là où l’aporie se montre utile, c’est qu’elle permet de classer les systèmes philosophiques dans trois catégories distinctes, en fonction de la proposition que chacune est forcée de réfuter.

A vous de voir où vous vous trouvez. Diodore réfute la troisième.

(Le lecteur souhaitant approfondir la question pourra lire Nécessité ou contingence. L’aporie de Diodore et les systèmes philosophiques, de Jules Vuillemin.)

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7 commentaires

  1. Elisabeth
    11 juin 2009
    Répondre

    Ce n’est pas tellement te regarder bizarrement que te regarder avec un regard vide et désespéré. Le mot qui me vient à l’esprit est « heeeiiinn »?!!!
    (je sais très classe, pas habillé, euh je m’égare, et très valorisant au niveau de mes capacités intellectuelles…)

  2. 12 juin 2009
    Répondre

    @Elisabeth : Hihi :-) Tu sais que j’ai déjà eu des visites de gens qui cherchaient l’aporie de Diodore…

  3. 13 juin 2009
    Répondre

    Comme dirait Winnie l’Ourson : « réfléchissons. »
    Les propositions 2 et 3 me paraissent tout ce qu’il y a de plus honnête. La première, en revanche, je n’en comprends pas le sens. Le mot « nécessaire » me gêne. Nécessaire à quoi?
    Du coup, dans quel groupe ma philosophie se classe-t-elle?

  4. Elisabeth
    14 juin 2009
    Répondre

    Alors là, quand on cite un philosophe, faut faire ça bien: Winnie l’Ourson dit « pensons ». J’ajoute d’ailleurs au passage qu’en anglais il dit « oh bother », ce qui exprime bien mieux mon état d’esprit quand j’ai essayé de faire sens de tout ce bazar, parce que moi je ne rentre pas dans vos catégories! (il reste à en tirer les conclusions qui en suivent…)

  5. 21 juin 2009
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    Le problème, c’est que les trois propositions m’intéressent. Merci du lien pour approfondir, parce que ce n’est pas à cette heure-ci que je réfléchis le mieux.
    (Pourquoi faire ce soir même ce que tu peux remettre à… une autre fois ?)

  6. fairyfeller
    18 novembre 2010
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    Bien le bonjour!
    Pardonnez-moi mon attitude quelque peu « intello », mais en voyant ça, je me dois de clarifier quelques petites choses..
    Il y a en tout 4 principes qui ont été formulé par Diodore Kronos (eh oui, je l’ai lu écrit de cette manière, et je m’y tiens.. :)) et qui réunis, constituent un paradoxe:
    a) Le passé étant irrévocable, seul un événement futur peut être possible.
    b) Un possible ne peut pas être la conséquence logique d’un impossible.
    c) Il y a un possible dont la réalisation n’a jamais lieu, ni dans le présent, ni dans le futur.
    d) Ce qui est, est nécessairement pendant qu’il est.
    Comme nous le dit si bien Jules Vuillemin, les Anciens ont considéré cette aporie comme valide, car à leurs yeux, elle démontrait l’incompatibilité de plusieurs principes dont on s’accorde à trouver la présence dans les conditions d’un acte libre et que le bon sens est porté à tenir pour vrais.
    La grande question philosophique qui est posée ici est en effet celle de la nécessité (déterminisme) ou de la contingence (liberté) du futur.
    Les conditions qui rendent possible un acte libre existent-elles dans la nature ou en nous-mêmes?? Autrement dit, les événements qui se déroulent dépendent-ils de nous, et dépendons-nous de nous-mêmes? Sommes nous déterminés par nos propres décisions, ou sommes nous des pantins guidés, prédestinés à être tels, sans aucune liberté (contingence)??

  7. 22 novembre 2010
    Répondre

    Merci beaucoup pour votre commentaire, et infiniment pour cette clarification ! On aimerait que votre commentaire ne s’arrête pas si tôt !

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